Par Alix GRENIER
UN ECO QUARTIER A ENERGIE POSITIVE POUR AVON
Concevoir un projet d’éco quartier à énergie positive revient à prendre des bottes de sept lieues, pour effectuer un saut qualitatif dans le traitement des opérations d’aménagement urbain. Le gouvernement souhaite qu’en 2020, tous les bâtiments soient à énergie positive. La Ville d’Avon, commune de 15 000 habitants située en Sud Seine-et-Marne, souhaitant aller encore plus loin, a décidé de construire aux abords de la gare SNCF, un « éco quartier à énergie positive ».
Aujourd’hui cependant, les concepts d’éco quartier et d’énergie positive sont loin d’être clairs pour tous, en témoignent les débats entre spécialistes des deux questions. Pourtant, rédiger les cahiers des charges traduisant les attentes de la commande publique vis-à-vis de l’aménageur, demande de préciser ces attentes, et de trancher les débats.
Le concept d’énergie positive étant le premier point d’interrogation et le pilier central de l’opération, il a donc fallu le définir, en dégager les enjeux, et le préciser pour arrêter un choix de conception. La performance d’énergie positive n’est pour le moment attribuée qu’aux bâtiments, il a ensuite fallu l’extrapoler à l’échelle du quartier. Ce changement d’échelle a lui-même soulevé de multiples questions et enjeux, et nécessité un effort de hiérarchisation et priorisation des choix retenus.
Cet article s’attachera donc dans un premier temps à rappeler comment et à quels enjeux environnementaux un éco quartier à énergie positive peut constituer une solution. Nous préciserons dans un deuxième temps les enjeux liés au concept d’énergie positive sur les bâtiments, les questions que cela soulève, les réponses que la Ville d’Avon a choisi d’y apporter, et les limites auxquelles elle s’est trouvée confrontée. Enfin, nous verrons comment passer d’une opération de construction de bâtiments à énergie positive à la mise en œuvre d’un éco quartier à énergie positive.
L’éco quartier, une réponse à des enjeux environnementaux
Un quartier, et par extension une ville ou un territoire aménagé, est globalement constitué de bâtiments (à usage agricole, industriel, tertiaire ou résidentiel), de voies de circulation, de moyens de transports, de terrains « naturels » et d’activités économiques. Les moyens de conception traditionnels de ce genre de quartier peuvent générer de multiples impacts sur l’environnement et la santé humaine :
- Perturbation des cycles biogéochimiques par les rejets ou émissions de polluants, Gaz à Effet de Serre…
- Fragmentation des écosystèmes et atteintes à la biodiversité
- Imperméabilisation, artificialisation, épuisement des sols
- Erosion des ressources naturelles (matières premières, matériaux de construction, énergies…)
- Emanations toxiques pour l’environnement et la santé humaine (Composés Organiques Volatiles, benzène, formaldéhyde…)
L’éco quartier est un concept né de la volonté d’inventer des opérations d’aménagement urbain dont les impacts sur l’environnement et la santé seraient limités.
Il est moins performant pour certains que le « quartier durable », qui intègre en plus des réflexions sur son dynamisme économique, sur l’intégration et/ou la mixité sociales. Pour d’autres, éco quartier et quartier durable sont équivalents.
Depuis que le structuro-fonctionnalisme est mis à mal, la mixité est à l’honneur dans les programmes d’aménagement, et à plus forte raison dans un éco quartier.
Les modes de vie occidentaux ont participé à la globalisation de ces impacts habituellement locaux, en les délocalisant. Une dimension multi scalaire se greffe alors à la notion d’éco quartier : penser global, agir local. Le concept est presque clair, les moyens pour y parvenir pour autant le sont beaucoup moins.
Le changement climatique qui alarme le monde entier depuis quelques années, est la manifestation la plus parlante d’un impact global lié à des pratiques locales. Causé en grande partie par le réchauffement de l’atmosphère à cause de l’utilisation immodérée d’énergie fossile(1) , dégageant des Gaz à Effet de Serre (GES), l’angle d’attaque privilégié des programmes de planification spatiale en faveur d’une réduction des impacts a donc été la réduction des consommations d’énergie.
Bâtiments et énergie : un cocktail explosif
Le secteur du BTP(2) et des transports sont les consommateurs majeurs de l’énergie produite mondialement, le BTP arrivant en tête avec 44% des consommations pour les bâtiments résidentiels et tertiaires. Les efforts du « green building », ou bâtiment vert, se sont alors naturellement portés sur la performance énergétique, par la construction de bâtiments moins énergivores.
Les consommations d’un bâtiment tertiaire ou résidentiel sont principalement dues au chauffage et à l’eau chaude sanitaire (ECS), puis à l’éclairage, le rafraîchissement et l’électricité spécifique. Elles représentent près de 70Mtep(3) en France en 2009.
Répartition des postes consommateurs d’énergie dans les bâtiments. Source personnelle d’après l’ADEME, les Chiffres Clés du bâtiment 2009
La consommation d’un bâtiment s’exprime en kilowattheure par mètre carré de SHON(4) et par an, noté kWh/m²/an. On rapporte ainsi à la surface utilisée et chauffée, la consommation annuelle.
Un bâtiment standard en France consomme en moyenne 200kWh/m²/an, tous postes confondus. Les recherches se sont axées sur les diminutions de consommations, ce qui a abouti à des labels et des règlementations thermiques (RT) très exigeants, allant jusqu’à des consommations maximales de 15kWh/m²/an pour les édifices PassivHaus. Ce sont des Bâtiments Basse Consommation, dits BBC, labellisés ou non.
La RT 2012 exigera des consommations alignées sur celles des actuels BBC Effinergie, à savoir 50kWhep/m²/an. Actuellement, les expérimentations sur des Bâtiments à Energie POSitive (BEPOS) éclosent petit à petit, anticipant largement les limites réglementaires de consommation énergétique.
Le BEPOS (Bâtiment à Energie POSitive)
Afin de relever les défis climatiques et énergétiques, le CSTB(5), a imaginé un bâtiment qui produit plus d’énergie qu’il n’en consomme, et cette production doit être d’origine renouvelable et locale. Une définition a priori claire : le bilan énergétique doit être positif. Seulement, quand il s’agit de passer à l’action, elle l’est beaucoup moins : que prendre en compte dans le bilan énergétique ?
Correspondance des flux énergétiques
L‘énergie se définit par des sources, des formes, un pouvoir calorifique et des flux : on ne produit pas à proprement parler de l’énergie, on la transforme (chaleur en lumière, en électricité, en travail mécanique…). Et ce processus de transformation induit des pertes lors du passage d’une forme à une autre : on parle alors de rendement sur la chaîne énergétique(6).
Un combustible, en présence d’oxygène, libère de la chaleur, qui peut se transformer en électricité lorsque la chaleur est transmise à un fluide caloporteur, actionnant des turbines reliées à un générateur d’électricité. On parle alors pour différencier l’énergie à la base de la chaîne, d’énergie primaire (notée ep) et pour l’énergie à la fin de la chaîne, celle qui est consommée réellement et relevée sur les compteurs ou les factures, d’énergie finale (notée ef).
Un BBC Effinergie(7) ne doit pas dépasser 50kWh/m² de SHON, en énergie primaire. En réalité, ce chiffre est modifié par un facteur de correction géoclimatique, qui réajuste les consommations en fonction de la localisation géographique, climatique, et d’altitude. Le calcul est obtenu par une consommation en énergie primaire Cep de 50kWh/m²/an, chiffre réglementaire, multiplié par un coefficient de localisation climatique : 1,3 pour la commune d’Avon qui se situe en zone climatique H1a, ce qui donne une Cep de 65kWh/m²/an.
Or généralement, la production d’énergie destinée à compenser les consommations est une production d‘électricité, puisqu’elle est la seule forme que l’on peut redistribuer et revendre sur un réseau.
Mais l’électricité est considérée comme une énergie finale, puisqu’elle est issue de la transformation d’une première forme d’énergie (thermique, hydraulique…). Conventionnellement, un facteur de conversion peut lui être appliqué pour passer de l’énergie primaire à l’énergie finale : ainsi en France, on considère qu’il faut 2,58kWhep pour produire 1kWHef d’électricité. De plus, l’électricité d’origine renouvelable a conventionnellement un facteur de transformation de 1, puisqu’elle ne nécessite aucune énergie fossile pour sa production.
Doit-on alors compenser la consommation d’un bâtiment par une production d’électricité comptabilisée comme énergie primaire ou énergie finale ? Et quel facteur de conversion lui attribuer : 1 ou 2,58 ?
Comptabilité du Bilan énergétique
Tout dépend à vrai dire des objectifs à atteindre, et relève plus d’une notion d’import/export (8) de l’énergie que de consommation/production.
Dans les importations d’énergie, il y a deux catégories : les énergies fossiles, et les énergies renouvelables locales. Les énergies renouvelables locales comptent comme production négative, c’est-à-dire qu’elles sont retranchées aux entrées totales d’énergie. Mais comme elles sont consommées localement, elles ne sont pas comptées dans l’exportation vers le réseau.
Le bilan se compte donc ainsi :
P : la production d’électricité renouvelable
F : le facteur de conversion 2,58
C : la consommation totale en énergie primaire
CENR : la consommation en énergie primaire de l’énergie produite localement de source renouvelable
Autrement dit, la production exportée d’électricité renouvelable sert à équilibrer positivement l’importation d’énergie fossile. A Avon, compte tenu des contraintes de surface notamment, cela desservirait le projet d’adopter une comptabilité avec un facteur de conversion de l’électricité renouvelable de 1, qui serait tellement exigeante qu’elle empêcherait toute initiative d’équilibre énergétique. Pour ces mêmes raisons de contraintes, on a également considéré comme équivalents les contenus énergétiques en kWh de toutes les formes d’énergie confondues, alors que l’on y applique généralement des facteurs de conversion.
On peut donc décider de compter la production d’énergie renouvelable en énergie primaire « évitée » : c’est-à-dire que distribuer 1kWhef d’énergie renouvelable, c’est éviter de distribuer 1kWhef qui a demandé 2,58kWhep pour circuler sur le réseau électrique, ce qui justifie le choix de conserver le facteur de transformation de 2,58.
Dans le cas d’un bâtiment consommant 65 kWh/m²/an, il faudrait produire par exemple 70 kWh/m²/an d’énergie renouvelable pour que le bilan soit positif. En électricité, cela équivaudrait donc à une production égale à environ 27 kWh/m²/an (9), puisque produire 27kWhef revient à éviter la consommation de 70kWhep ailleurs du le réseau.
Les sources d’énergie
Reste alors à convenir des différentes sources d’énergie.
Pour l’importation, l’énergie peut provenir du réseau électrique, d’un réseau de chaleur local, de chaudières (gaz, fioul…) en pied d’immeubles… La seule contrainte serait la performance énergétique de ces équipements, afin de limiter les pertes et d’améliorer les rendements.
Pour l’exportation, le choix peut se porter sur tous les types de production d’électricité renouvelable locale, mais les panneaux photovoltaïques en toiture semblent les plus indiqués à Avon (par rapport aux potentialités du site).
En ce qui concerne la production négative, elle peut être assurée par des panneaux solaires thermiques, thermodynamiques, ou même être issue du chauffage au bois, de micro cogénération…
Cette réflexion sur les consommations, équivalences, formes et sources d’énergie ne doit pas oublier de prendre en compte l’objectif final : la réduction des consommations. Dans la définition du CSTB, il manque en effet une précision : le BEPOS doit consommer peu. Le risque serait grand, surtout avec les facteurs de conversion de l’électricité produite, de consommer beaucoup mais produire beaucoup, ce qui serait au mieux une performance technique, mais certainement pas une performance d’économie d’énergie.
Le premier poste de consommation étant le chauffage, c’est sur celui-ci qu’il faut jouer au départ. Les surconsommations de chauffage viennent la plupart du temps de mauvaises performances thermiques de l’enveloppe du bâtiment. Réduire les consommations d’énergie passe donc d’abord par la réduction des besoins de chauffage, qui passe elle-même par l’amélioration des performances thermiques des bâtiments.
Les performances thermiques des bâtiments
Afin d’améliorer les performances thermiques des bâtiments, il s’agit de :
• Rendre les bâtiments étanches à l’air
Il faut travailler essentiellement sur les propriétés des matériaux de construction : isolation, inertie et déphasage thermique, c’est-à-dire les capacités de résistance à l’air, de captage et de stockage de la chaleur, et de sa restitution. Des matériaux de construction et d’isolation avec ces propriétés thermiques très précises devront être choisis de manière à obtenir un coefficient U le plus faible possible (faible conductivité thermique (λ) et forte résistance thermique (R) des matériaux et des vitrages), et des propriétés performantes en matière d’inertie et de déphasage thermiques.
Les ponts thermiques devront être réduits, et pour cela on privilégiera une isolation par l’extérieur.
Au total, le coefficient Ubat devra donc être le plus faible possible.
• Maîtriser la ventilation des bâtiments
Mettre en place des systèmes de ventilation permet d’assainir le bâtiment, réguler l’humidité, et d’offrir un potentiel de chauffage aéraulique, par diffusion la chaleur ou la fraîcheur. Une ventilation mécanique double flux, par exemple, éventuellement couplée à des récupérateurs de chaleur sur air vicié peut participer largement à l’augmentation de la performance thermique de bâtiments assurée déjà en grande partie par le choix des matériaux. Un système de ventilation par les puits canadien peut également offrir une bonne solution naturelle.
• Assurer le confort hygrométrique et thermique des bâtiments
En général, la température intérieure « confortable » est fixée à 19°C. Cette estimation ne tient généralement pas compte de l’importance de la température ressentie, qui est la moyenne de la température ambiante (celle de l’air) et de la température radiante (celle transmise par rayonnement) : si les parois sont à 10°C, et l’air à 20°C, la température ressentie sera de 15°C. Plus précisément, elle se détermine en fonction de la température Ti de surface Si de chacune des parois intérieures du local :
Le confort humain est précisément cette moyenne. Il y a une sensation de froid à partir de 3°C de moins, et une sensation de chaud à partir de 3°C de plus. La variation de température selon l’orientation et la partie du corps compte également dans ce confort : un chauffage radiant trop intense, directionnel par définition, ou un mur trop froid, sont rarement confortables. D’où l’importance de privilégier l’isolation par l’extérieur, qui permet aux murs intérieurs d’être à la température de l’air intérieur.
• Assurer une conception bioclimatique
Elle permet des apports passifs d’énergie, sous forme lumineuse ou de chaleur. Les couleurs choisies pour les revêtements extérieurs des bâtiments jouent un rôle dans leur capacité à absorber ou réfléchir le rayonnement solaire. L’étanchéité à l’air et l’isolation très performante ne doivent pas se faire au détriment du confort d’été, qui peut être perturbé en raison des surchauffes.
• Utiliser autant que possible des matériaux naturels
Ils ne sont pas toxiques ni pour la santé humaine ni pour celle de l’environnement, et nécessitent peu d‘énergie grise.
Ce dernier point introduit une notion intéressante : l’énergie grise. Il s’agit de la somme de toutes les énergies nécessitées par la fabrication, le transport, la mise en œuvre des matériaux de construction.
Les frontières du système
L’énergie grise n’est aujourd’hui pas comptabilisée dans les bilans énergétiques des bâtiments. Pourtant, elle a été consommée pour permettre l’utilisation de bâtiments, et représente un flux d’importation dans le système bâtiment élargi. On peut même, en estimant la durée de vie d’un édifice, rapporter cette quantité totale par surface de SHON et par an. On pourrait donc l’ajouter aux consommations liées à l’utilisation du bâtiment. Dans une démarche rigoureusement scientifique, il faudrait absolument l’inclure, d’autant plus que sur la totalité de la durée de vie d’un bâtiment, la consommation d’énergie grise équivaut presque à aux consommations liées à son utilisation [ADEME]. Ce n’est pas le cas, aujourd’hui, pour des difficultés d’ordre essentiellement financier et technique.
Sur un immeuble de logement collectif, il est déjà compliqué, compte tenu du rapport entre la surface disponible en toiture pour la production d’énergie renouvelable, et la SHON sur laquelle on calcule les consommations, de parvenir à un bilan positif. Si on doit inclure l’énergie grise, cela devient presque systématiquement impossible. Seule une amélioration technologique des rendements des panneaux photovoltaïques pourra permettre un jour d’être très rigoureux dans la démarche de bilan énergétique, ou bien une connexion des bâtiments à des réseaux d’énergie renouvelable supra locaux, à l’échelle du quartier par exemple.
Les conditions de faisabilité d’un BEPOS, et les choix particuliers retenus à Avon ayant été énoncés, peut-on prétendre qu’il suffise de concevoir ces BEPOS pour obtenir un éco quartier à énergie positive, comme le souhaitait la commande publique ? Peut-on et comment extrapoler le concept d’énergie positive à un quartier ?
L’énergie positive à la recherche d’un éco quartier
A l’échelle d’un quartier aussi il y a des flux d’import/export d’énergie, de biens de consommation... Peut-on appliquer à ces flux les mêmes relations qu’aux flux énergétiques des bâtiments ?
Quelle énergie positive…
Sur le quartier, il y a des flux d’importation d‘énergie liée à l’éclairage public, celle consommée par les transports, des flux d’énergie grise due au mobilier urbain, aux infrastructures de transport (revêtement routier, caniveaux, trottoirs…), et le flux des déchets.
On pourrait techniquement dans l’absolu produire des bilans en énergie positive pour tous ces flux : on pourrait installer des systèmes solaires photovoltaïques sur les mâts d’éclairage, les bornes de parking, comme ça l’est déjà parfois. A Toulouse, on expérimente un trottoir muni de micro capteurs de mouvements, qui les transforment en électricité qui alimente les lampadaires de la rue. On pourrait compenser l’énergie consommée pour la fabrication d’un objet par celle qu’il produirait une fois réduit à l’état de déchet dans un processus de fermentation libérant du biogaz. Cela pourrait même contribuer au bouquet énergétique alimentant les bâtiments du quartier.
Néanmoins, les conditions technico-économiques du moment, et les contraintes particulières qui pèsent sur le site du futur quartier d’Avon, ne permettent pas le choix d’une comptabilité d’un bilan à énergie positive à l’échelle du quartier.
L’énergie positive à Avon sera donc des BBC (qui est l’expression d’une performance thermique de l’enveloppe) dont le bilan à énergie positive (qui est l’expression d’une performance énergétique du rapport flux importés/exportés) ne se fera que sur l’énergie fossile consommée pendant leur utilisation (c’est-à-dire sans l’énergie grise), et se calculera en énergie primaire.
…pour quel éco quartier ?
Dans la mesure où toutes les conditions mentionnées supra ne permettent pas la faisabilité de bâtiments à énergie positive lato sensu, (puisque l’option retenue ne prend pas en compte tous les flux, comme l’énergie grise), et que vraisemblablement le bilan ne se fera pas à l’échelle du quartier mais uniquement à celle du bâtiment, il convient alors de hiérarchiser et prioriser les autres actions à mener , la qualité environnementale d’un quartier n’étant pas réduite à l’expression d’une performance énergétique. De plus, la qualité de l’ensemble du cadre de vie pourra également justifier les surcoûts de construction et garantir la performance environnementale générale du quartier.
A Avon, la stratégie de l’éco quartier s’est alors effectuée comme suit :
Une gestion raisonnée de l’eau : en favorisant autant que possible les infiltrations et les circulations hydriques naturelles ; en récupérant les eaux pluviales pour l’arrosage ou pour l’eau sanitaire
Une gestion rationnelle des déchets : en favorisant le tri
Une protection des ressources naturelles : en connectant le quartier à des réseaux suprarégionaux de corridors écologiques, et en compensant les impacts sur la biodiversité (par exemple par des façades ou toitures végétalisées, même si c’est au-dessus des parcs de stationnement), en limitant les émissions de polluants…
Des moyens de circulation alternatifs : en invitant aux déplacements doux par des aménagements visuels et sécurisés de cheminement, réfléchis en fonction de la topographie, et profiter du pôle de la gare pour en faire un hub multimodal.
De cette manière, le projet traite l’ensemble des thèmes porteurs d’un aménagement urbain durable, puisqu’il conçoit un véritable écosystème urbain. Ses performances sont peut-être revues à la baisse par rapport à une vision très stricte de ce que pourrait être un éco quartier à énergie positive, mais il est déjà beaucoup plus performant qu’un « simple » quartier de bâtiments à Haute Qualité Environnementale (HQE), puisqu’il a au moins le mérite d’être plus exigeant sur le volet énergie, et de traiter les autres sujets de manière plus poussée par rapport à la base réglementaire.
Ce n’est donc pas un éco quartier à énergie positive qui est en projet à Avon, mais l’éco quartier à énergie positive d’Avon : la distinction se fait sur l’adaptation en fonction des contraintes et des potentialités locales, démarche qui doit ensuite s’inscrire dans un développement durable pour la région avonnaise.
Intégration d’un écosystème urbain : un éco quartier en devenir
Il s’agit alors de profiter de la dynamique de l’éco quartier pour rendre la Ville exemplaire en matière de développement durable. La Municipalité d’Avon, à l’initiative du Maire, a souhaité poursuivre cette démarche de développement durable, et l’étendre sur toute la commune, par la mise en place d’un Agenda 21 institutionnel.
Une fois élargi à un Agenda 21 territorial qui n’est encore qu’un projet, cet outil servira également à connecter et intégrer l’éco quartier au reste de la Ville. A ce moment-là seulement, il pourra se rapprocher et peut-être atteindre une version plus performante encore d’un éco quartier à énergie positive. Desservi par un réseau communal d’énergies « vertes » (géothermie par exemple), connecté à un réseau et des installations de valorisation des déchets, il augmentera ainsi la part d’énergie renouvelable dans ses importations, et aura moins d’énergie fossile à compenser. Il pourra alors peut-être, compenser les énergies grises…
C’est un cercle vertueux à mettre en place. Il faut bien commencer : certains débutent par un Agenda 21, Avon a choisi de montrer un exemple concret. Le quartier des Yèbles de Changis ne sera peut-être pas dès le départ rigoureusement un éco quartier à énergie positive, mais la dynamique qu’il a impulsée le rendra de plus en plus performant.
En somme, ce qui caractérise le plus sûrement un éco quartier, c’est son évolutivité.
(1) Gaz, pétrole, ou charbon : ressources épuisables et carbonées, libérant donc lors de leur combustion du CO2, principal GES
(2) Bâtiments et Travaux Publics
(3) Tonne Equivalent Pétrole
(4) SHON : Surface Hors Œuvre Nette : cumul des surfaces de planchers de chaque niveau, déduction faite des surfaces de combles, sous-sol et surfaces non aménageables (- 1m80) et surfaces non closes (balcons, loggias…). Elle est différente de la SHOB (surface hors œuvre nette), qui est la surface réelle occupée sur le terrain par le bâtiment
(5) Centre Scientifique et Technique du Bâtiment
(6) Une ampoule classique par exemple a un rendement de 10%, puisqu’on estime que sur la totalité de l’énergie consommée, seulement 10% est transformé en électricité, et le reste en chaleur
(7) www.effinergie.org
(8) THIERS. S. Bilans énergétiques et environnementaux de bâtiments à énergie positive. Publications de l’Ecole des Mines de Paris, 2008
(9) 70/2,58 = 27